Library / Literary Works

    Paul Verlaine

    L’Apollon de Pont-Audemer

    Un solide gaillard ! dix-huit ans : larges bras ;
    Mains à vous arracher la tête de l’épaule ;
    Sur un front bas et dur, cheveux roux, coupés ras.
    Puis, à la danse, il a, ma foi, crâne air, le drôle !

    Les enfants poussent drus aux filles qu’il enjôle,
    Dans la puberté fière et fauve, le beau gas
    Va, comme dans sa pourpre un roi qui sait son rôle
    Et parle à voix hautaine, et marche à vastes pas.

    Plus tard, soit que le sort l’épargne ou le désigne,
    On le verra, bon vieux, barbe blanche, œil terni,
    S’éteindre doucement, comme un jour qui finit,

    Ou bien, humble héros, martyr de la consigne,
    Au fond d’une tranchée obscure ou d’un talus
    Rouler, le crâne ouvert par quelque éclat d’obus.


    9 septembre 1864.




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